Rencontre avec Gaël Bardou, producteur d’Ail Rose à Lautrec et président du Syndicat de l’Ail Rose de Lautrec

IMG_7228Lautrec est une petite commune du Tarn, en région Occitanie, d’à peine 2000 habitants. Elle est située entre Albi et Castres en plein cœur du Pays de Cocagne. Ce village tarnais pourrait n’être qu’un très joli village, mais en plus de cela, il possède un trésor : l’Ail Rose de Lautrec. Et tous les ans le premier vendredi du mois d’aout tout le village célèbre son trésor, cette année se sera les 5 et 6 août (toutes les informations sur www.ailrosedelautrec.com ). J’ai découvert l’Ail Rose en m’installant dans la région il y a de nombreuses années. J’ai souhaité partir à la rencontre d’un producteur, c’est Gaël Bardou le président du Syndicat de l’Ail Rose qui a accepté de me recevoir et de répondre avec beaucoup de gentillesse et de patience à mes questions.

Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? J’ai bientôt 39 ans, je suis marié, je suis papa de deux garçons qui ont 7 et 10 ans et je suis de Lautrec depuis plusieurs générations ! Mon parcours a été classique, l’école, l’armée, travail sur l’exploitation familiale… Je ne me suis jamais posé de questions sur mon avenir, reprendre l’exploitation familiale c’était une évidence, c’était prendre la suite de mon père, de mon grand-père. Je me suis officiellement installé en 2001. C’était et c’est un privilège, une fierté.

Combien êtes-vous sur votre exploitation ? Mon épouse est salariée à mi-temps, il y a moi bien sûr et ensuite de juin à février, nous employons du personnel saisonnier.IMG_7220

Vous êtes producteur d’ail rose ! Oui mais pas que. Je cultive également des céréales. Le cahier des charges pour produire de l’Ail Rose de Lautrec impose aux producteurs une rotation des cultures sur 4 ans minimum. Dit autrement sur une même parcelle on ne peut planter au mieux de l’ail rose qu’une année sur quatre. La diversification est donc indispensable, aucun producteur ne peut être que producteur d’ail rose.

Qu’est-ce qui vous plait dans votre métier ? Etre dans la nature au grand air, on se sent plus libre ! Je ne me verrais pas en ville derrière un bureau… On récolte ce que l’on sème au sens premier de cette expression. Cela signifie qu’il faut bien travailler si on veut avoir une bonne récolte, on ne maitrise pas la météo, mais on maitrise ce que l’on fait. Et produire un produit d’exception c’est valorisant.

Qu’est-ce qui est le plus difficile dans votre métier ? On ne compte pas les heures. A certaines périodes, les journées sont longues et les nuits très courtes. Lorsque le moment de la récolte est là, on ne peut la retarder de quelques jours, on est pas à l’abri d’intempéries, alors on travaille du lundi au dimanche non-stop.

IMG_7222Vous produisez un ail qui est labélisé, est-ce important ? L’Ail Rose possède deux labels, qui ne sont pas interchangeables, les deux sont importants. L’IGP (Indication Géographique Protégée) que l’Ail Rose a depuis 20 ans, permet de protéger une zone de production, afin d’éviter que l’on produise de l’Ail Rose de Lautrec ailleurs en France ou à l’étranger. L’Ail Rose de Lautrec possède également le Label Rouge depuis 1966, cela fait 50 ans cette année. Dans la catégorie des fruits et légumes, c’est un des premiers à avoir été labélisé. Le label rouge, c’est le label le plus exigeant dans le cahier des charges, mais c’est aussi le plus fort, le plus reconnu par les consommateurs. Les labels c’est une formidable plus-value, c’est une reconnaissance d’un produit, de sa qualité.

Ça se concrétise comment pour vous producteur cette reconnaissance du produit ? C’est un produit qui est reconnu d’exception, et ça change tout. On a un échange avec le consommateur, puisque l’on va au contact des gens lors d’actions de promotion du produit, lors de salons (salon de l’agriculture, SISQUA…).        Les grands chefs parlent de notre production, de sa qualité. Que la qualité de l’Ail Rose de Lautrec, soit reconnue c’est une fierté. La production de l’ail c’est à toutes les étapes un travail manuel, du début à la fin on le façonne, ce n’est pas comme le blé que l’on plante, moissonne et vend.

Un travail manuel à chaque étape, vous pouvez m’en dire plus ? Oui !

  • Entre le 1 décembre et le 15 janvier, on plante des gousses d’ail de l’année précédente, on les a choisies pour cela et ce ne sont pas les plus petites ! Le tri, le choix des gousses à planter se fait à la main.
  • Il faut ensuite régulièrement passer dans les champs pour enlever le maximum d’herbes, comme dans un jardin ou l’on bine la terre.
  • Vers fin mai et début juin on coupe la hampe florale, cette opération se fait à la main avec un sécateur, et est assez pénible. Si la hampe florale n’est pas coupée, la fleur va se développer, la sève va monter et le bulbe donc l’ail sera tout petit, il ne pourra pas se développer.IMG_7210
  • Environ trois semaines après on arrache l’ail avec l’aide d’une machine cette fois, qui fait des paquets de quelques aulx.
  • Les paquets vont être déposés manuellement sur des barres dans un hangar aéré afin de sécher pendant environ 3 semaines. Certains utilisent une soufflerie, ce qui est autorisé.
  • Ensuite on nettoie chaque ail en coupant le feuillage et les racines au sécateur. Puis avec un couteau on déshabille, on pèle l’ail en ôtant la peau, opération délicate, il ne faut laisser que la dernière peau qui laisse entrevoir le grain rose.
  • On fait les manouilles de 500 gr ou 1 kg, en mettant pour résumer, les plus petites têtes en bas et les plus grosses en haut.

IMG_7233Pourrait-il y avoir de l’ail rose ailleurs ? Mais il y en a comme l’ail rose de Billon en Auvergne ! Mais ce n’est pas de l’Ail Rose de Lautrec. L’ail est un produit très particulier qui est sensible au terroir sur lequel il est planté, un peu comme les cépages qui font le vin. Ce qui fait l’Ail Rose de Lautrec au-delà du savoir-faire des producteurs c’est le terroir argilo calcaire sur lequel il pousse.

Vous êtes le président du Syndicat de l’Ail Rose de Lautrec, c’est une surcharge de travail ? Les producteurs se réunissent en assemblée générale pour élire un conseil d’administration au sein duquel le président est élu. Pendant 25 ans, c’est JF Tournier qui a été le président du Syndicat, je l’ai remplacé il y a un an. Mais j’étais depuis 2002 au conseil d’administration et depuis 2007, vice-président. Oui c’est une surcharge de travail mais je ne me suis pas posé de question, c’était comme une évidence.

Combien de producteurs y a-t-il dans la filière ? Il y a 160 producteurs sur une surface de 400 hectares qui produisent de l’ail labélisable. Chacun a son caractère comme partout mais il y a une bonne entente, un bon état d’esprit au sein de la filière.

Qu’est-ce qu’un ail labélisable ? Ils ne le sont pas tous ? L’ail labélisable, c’est l’ail « parfait » celui qui correspond esthétiquement au cahier des charges, et ils ne le sont pas tous. L’ail doit être rose bien sûr mais si une gousse de la tête est légèrement abimée, si la couleur n’est pas parfaite, l’ail est déclassé en ail du Tarn. En effet s’il sèche au soleil, il ne sera pas rose alors que c’est bien de l’Ail Rose de Lautrec.

Quel est le rôle du Syndicat de l’Ail Rose de Lautrec ? Le syndicat a un double rôle. Un rôle de promotion bien sûr car même si on travaille avec une agence de communication, on fait beaucoup de choses. Mais le syndicat doit veiller à la qualité du produit, avoir le label rouge c’est bien, mais le garder c’est mieux et pour cela il faut être rigoureux.

Est-ce à dire qu’il y a des contrôles pour conserver un label ? Oui ! Des contrôles internes effectués par les salariés du syndicat qui sont 3 et des contrôles externes effectué par Qualisud. A chaque fois le contrôle porte sur les documents et sur des lots de produits pris au hasard. Le suivi, la traçabilité sont importants. Chaque manouille est vendue avec son étiquette Label Rouge qui permet de connaitre le producteur et la parcelle sur laquelle l’ail a poussé. IMG_7226

On ne trouve jamais de tresses d’ail rose, pourquoi ? Effectivement vous achetez des manouilles de 500 gr ou 1 kg, et non des tresses. L’ail rose ne peut être tressé, parce que c’est ce qu’on appelle un ail à bâton, il a une hampe florale qui empêche le tressage. Ce sont ces « bâtons » qui permettent de les attacher ensemble en manouilles tenus par une ficelle rouge (cahier des charges du label rouge). En haut de la manouille il y a l’étiquette.

Quels conseils de conservation pouvez-vous nous donner ? Il faut le suspendre dans un endroit frais, aéré, comme un garage. Il peut également se conserver dans une cuisine aérée mais il ne se conservera pas s’il est côté de la plaque de cuisson.

Quelques idées de recettes ? Il y en a beaucoup, quelques idées :

  • Coupez l’ail en fines pétales et les faire cuire sur la plancha avec un peu d’huile, attention l’ail ne doit pas brûler, vous obtenez des chips d’ail, mes fils adorent ça !
  • Mettez une tête d’ail en chemise couverte de graisse de canard au four Th 180° pendant 20 à 30mn, vous obtenez de l’ail confit.
  • Faites cuire des gousses d’ail dans du lait, quand elles sont cuites, mixez. Cela donne une crème d’ail excellente avec des grillades.
  • Faites cuire de la saucisse de Toulouse dans une poêle en mettant au centre une tête d’ail en chemise, l’ail va cuire dans le jus de la saucisse. C’est comme ça que j’ai fait aimer l’ail à ma belle-famille originaire de Lorraine !

 

 

 

 

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